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     Souvenir de madeleine du côté de chez Jeannette...

    Durant 66 ans, la Biscuiterie Jeannette, implantée à Ifs, embaumera le quartier de la Plaine des odeurs de cuisson de sa fameuse madeleine [1918-1984]

    Accueil La biscuiterie Jeannette est la plus ancienne biscuiterie normande. Elle est le mariage de l'essor de l'agri­culture normande avec le développement du chemin de fer et du savoir faire ancestral pâtissier normand. Tout a com­mencé en 1850, lorsque le maître pâtis­sier M. Mollier, installe la biscuiterie "Maison nor­mande" à Caen, rue Singer.

    L'établissement se spécia­lise dans les "biscuits de luxe" (petits fours, sablés normands, biscuits de Reims, biscuits à la cuiller), qui lui valent de remporter de nombreux concours agricoles dont notamment la médaille d'argent à l'ex­position universelle de Paris, en 1900, et la médaille d'or en 1911. C’est le sacre des produits du terroir. Les biscuits sont fabriqués à partir de farine et oeufs de la plaine de Caen et de beurre de la Manche. En 1918, Albert Boissel crée une biscuiterie à Ifs, rue de Caen, en limite du territoire de la préfecture du Calvados à deux pas de l’actuel carrefour de l’Aviation.

     « Boissel, né à Paris en 1868, fonde avec son père Paul à Littry, près de Balleroy, une société d'escomptes en 1896. Leur association concerne toutes opérations d'escompte, de recouvrement et de réceptions de fonds en dépôt. En 1901, la Société est dissoute. Après la guerre 14-18, c'est à Ifs, petit village sud de Caen, que l'on retrouve la trace d'Albert Boissel. Celui-ci a décidé de quitter le monde de la banque afin de monter une biscuiterie. Habitant près d’Isigny, il saisit l'importance économique que peut avoir la fabrication de biscuits à grande échelle. En s'associant avec le biscuitier caennais Pierre Mollier, qui lui vend ses secrets de fabrication, Albert Boissel emménage avec femme et enfant, ainsi que son père, route de Falaise, sur le site même de fabrication des biscuits. Dans la liste des électeurs au Conseil des Prud'hommes établie en 1925, on trouve son nom. Il est même précisé que c'est la septième année d'inscription ; on peut donc en déduire que la création de la biscuiterie dans la commune remonte à 1918. » Extrait de la « Biscuiterie Jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010, page 23. 

    En 1925, Lucien Jeannette arrive dans l’entreprise d’Albert Boissel.

    En 1927, Lucien Jeannette s’associe avec Pierre Mollier et Albert Boissel et achète l’usine qui devient la « Biscuiterie Moderne du Calvados ».

    « Devant maître Bocave, notaire à Caen, Lucien Jeannette achète la Biscuiterie Boissel, le 2 mai 1927. Maître Jouanne, avocat de la rue Saint-Martin à Caen, est toujours propriétaire de l'immeuble. Désirant se fixer dans la commune, Lucien Jeannette fonde une famille en épousant, un an après l'achat de la biscuiterie, une jeune fille de la région parisienne, Marie-Louise Thoreau. Lucien Jeannette va véritablement impulser une dynamique nouvelle à l'usine, qu'il baptise la « Biscuiterie Moderne du Calvados ». Ses premières factures gardent le nom des premiers biscuitiers, Pierre Mollier et Albert Boissel. Il emploie alors quelques ouvriers, domiciliés pour la plupart à Ifs, et son épouse le seconde pour la comptabilité de l'entreprise. La production de la biscuiterie est variée - gâteaux secs, croquettes aux amandes, galettes de Caen, boudoirs et sablés. » Extrait du livre « La Biscuiterie jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010, page 28. 

    En 1930, Lucien Jeannette dépose la marque « Galette de Caen » auprès du Tribunal de Commerce de Caen. La variété souligne le sacre des produits du terroir : gâteaux secs, croquettes aux amandes, galettes de Caen (marque déposée), boudoirs, sablés, beurrés normands, gaufrettes, pâtisseries, p'tit beurre (petit normandy - marque déposée), petits normands aux fruits secs, oeufs de conserve, madeleines... Jeannette affirme son positionnement de mar­que sur le territoire fran­çais. Les premiers voyageurs de commerce vont partout en France démarcher les com­merçants. Les premières livraisons en camion appa­raissent. « Jeannette », sym­bole d'une Normandie qui gagne s'impose à l'image : laitière normande, sa canne à lait sur l'épaule, arpentant un chemin de terre entre mer et campagne.

     « La Biscuiterie Jeannette, bien sûr, n'a pas été épargnée par les destructions (de 1944). Un certificat du maire d'Ifs daté de 1954, atteste que les soldats allemands, après la libération de la rive gauche de Caen par les Alliés, ont occupé la majorité des maisons en bordure de la route de Falaise, en parti­culier les locaux de la Biscui­terie. Après la guerre, Lucien Jeannette va se démener pour reconstituer le stock et relancer la production. Dès janvier 1945, l'acti­vité commerciale reprend et l'industriel déclare un chiffre d'affaires de plus de cinq millions de francs. Quant au matériel, il faudra deux années encore pour le remplacer. » Extrait de « La Biscuiterie Jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010, page 41.

     « Lucien Jeannette, homme prématurément usé par tous ces efforts pour le bien de ses concitoyens et la reconstruction de son entreprise, décide de passer la main. N'ayant pas d'héritier à qui transmettre ce patrimoine, il songe à la vente. La transaction de l'usine et de l'unique camion Citroën a lieu le 21 octobre 1951 avec Eugène Vinchon, qui constitue le jour même une SARL pour ses fils Raymond et Jean. Lucien Jeannette vend aussi les marques de fabrique « Petit Normandy » et « Galette de Caen », dont les numéros figurent sur le registre spécial des marques de fabrique, tenu au service de la propriété individuelle. Enfin, il décide de ne pas se représenter aux élections municipales de 1953 et se retire avec sa femme à Antony, près de Paris. La page de l'époque Jeannette est tournée. » (…)

    « On retrouve Lucien Jeannette quelques années plus tard, dans une toute petite maison rue de Montréal à Venoix, commune aujourd'hui rattachée à Caen. Détaché de la biscuiterie, il reste toutefois gérant de la minoterie, ce qui lui rapporte un certain revenu. Alors commence pour l'homme d'affaires une nouvelle vie plus paisible, à l'ombre de son cerisier Tranquille Mimile » selon l'expression de Jean Colin, historien local qui était aussi son voisin. Une nouvelle vie en conformité avec son idéal chrétien, puisqu'il prend en main les enfants de la paroisse Saint-Gerbold. Il les initie au catéchisme, activité bénévole qu'il mènera jusqu'à la fin de sa vie, en compagnie de sa femme. Yves Lecouturier, ancien directeur du musée de la Poste à Caen, se souvient de ce petit homme discret, vêtu simplement, qu'il a connu vers 1960 avant de faire sa communion solennelle. Il n'avait pas besoin d'élever la voix pour se faire obéir des enfants qui le respectaient naturellement ; « pas un mot plus haut que l'autre ». Il se souvient également de madame Jeannette qui distribuait des bonbons aux enfants à chaque bonne réponse. Lucien Jeannette était un homme d'une grande bonté : tous les témoignages le confirment. Animé d'une solide foi chrétienne qu'il n'a jamais quittée que ce soit en temps que chef d'entreprise, élu municipal ou responsable de catéchèse. Le grand drame de la vie de cet homme aura été celui de n'avoir pas d'enfant à qui confier la succession de l'entreprise. Lucien Jeannette décédera dans les années 80, victime d'un cancer. »  Extrait de « La Biscuiterie Jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010, pages 46-47.

     L'entreprise développe sa stratégie de communication et passe à l'ère de l'industrialisation, à partir de 1951, sous la direction des frères Vinchon qui achètent l’entreprise et fondent une S.A.R.L. L'effectif de la biscuiterie passe de 15 personnes en 1950 à 240 personnes en 1985.

    Le développement des grandes surfaces conforte sa croissance : une flotte importante de 50 camions sillonne la France. L'entreprise exporte en Europe et outre Manche. Années 70 : 40% en volume de madeleines France sont vendus avec la marque « Jeannette » ce qui la place, au début des années 80, parmi les premiers biscuitiers français et premiers fabricants de pâtisserie générique, avec 35% de parts de marché et une croissance de l'ordre de 16% par an ! Les chiffres don­nent le tournis: 15.000 madeleines par heure ; 45 à 50 tonnes de bis­cuits par jour (septembre 1983).

    Par la suite, les Vinchon achèteront la Biscuiterie Caennaise, rue de la Marne à Caen, et construiront un entrepôt à Frénouville.

    C’est en 1984, que l’usine Jeannette cesse son activité à Ifs, près du carrefour de l’Aviation, et installe toute sa production rue de la Marne à Caen. Après cela c’est une autre histoire qui commence puisque Vinchon-Jeannette est racheté en 1986 par le groupe Gringoire-Brossard… 

    Article d’après « 100 ans, les grandes entreprises familiales du Calvados » Liberté/le Bonhomme Libre hors série 2010.

    Et pour plus d'informations lire le livre la « Biscuiterie Jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010

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    Très forte "Jeannette" ! Essayez un jour de transporter une canne à lait pleine sur l'épaule en la maintenant avec une cordelette...

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    A gauche, rue de Caen/rue de Falaise : l'ancienne usine, transformée en centre commercial ; le manoir de Lucien Jeannette dit "Manoir de Lépron". On voit les initiales "JL" en haut de la tour et le logo de la marque au-dessus de la porte (photos 2012).

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    EPILOGUE en 2014 : un article extrait du site de Tendance Ouest du 29 janvier 2014 :

    http://www.tendanceouest.com/caen/actualite-67358-la-biscuiterie-jeannette-appartient-desormais-au-passe.html

    La biscuiterie Jeannette appartient désormais au passé

    Mardi 28 janvier (2014) se terminaient officiellement les contrats de 29 des 36 salariés de la biscuiterie Jeannette basée à Caen.

    « Un peu plus de 163 ans après sa création, la plus ancienne entreprise de la capitale bas-normande, la biscuiterie Jeannette, a définitivement fermé le mardi 28 janvier. C’est à cette date que se terminent officiellement les contrats de 29 des 36 salariés de l’usine, les autres prenant fin le 3 février prochain. La production est arrêtée depuis cinq semaines. Le 18 décembre dernier, le tribunal de commerce de Caen avait prononcé la liquidation judiciaire de l’entreprise. La cinquième de son histoire. Aucun repreneur ne s’est manifesté depuis, malgré un projet de reconversion à Falaise. “C’est bien dommage parce que nous avions trouvé de nouveaux locaux aux normes agro-alimentaires”, se désole Françoise Bacon, déléguée du personnel. Depuis le début du montage du dossier à l’automne 2012, aucune banque n’a voulu soutenir l’investissement de 750 000 € au côté de l’actionnaire principal, le groupe LGC. “Du coup, il s’est retiré et il nous fallait alors trouver 6 millions d’euros, soit une somme impossible à réunir entre nous”. » TO
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  • Commentaires

    1
    Proust Marcel
    Mercredi 29 Décembre 2010 à 18:32

    Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi.

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