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Guerre et faits à IFS
Annie Fettu qui a longtemps fréquenté les couloirs des archives départementales du Calvados a rédigé un livre qui retrace l’histoire de la biscuiterie Jeannette implantée à Ifs en 1918. Elle y raconte à cette occasion quelques faits se rapportant à l’histoire de la commune d’Ifs durant et après la seconde guerre mondiale.
« ... Au cours des heures sombres de l'occupation, la municipalité d'Ifs à laquelle participe activement Lucien Jeannette, élu conseiller municipal depuis les élections de 1936, administre comme elle le peut une commune dont les habitants sont en butte à la restriction et au Service du Travail Obligatoire. Elle doit aussi gérer l'afflux des réfugiés belges fuyant les zones de combat, qui se sont installés dans la commune en 1939. Lucien Jeannette est sur tous les fronts : aux commandes de son entreprise et au conseil municipal. Une vingtaine d'hommes originaires de la commune sont retenus prisonniers en Allemagne. Le problème à la fois de l'alimentation en charbon et des allocations pour les familles se pose de façon cruciale, d'autant plus que le budget communal se trouve amputé du tiers de ses ressources.
Il faut se représenter la situation dramatique que connaît le Calvados depuis les premiers bombardements du 6 juin 1944. La ville de Caen et toutes les communes environnantes croulent sous les bombes. Les gens qui n'ont pu s'exiler, ont trouvé refuge dans les carrières de Fleury-sur-Orne ou à Mondeville. Les Alliés qui pensaient libérer Caen le soir du 6 juin, échouent dans leur projet, Un terrible siège de six semaines s'installe, ponctué de bombardements meurtriers faisant près de 2 000 morts parmi la population. Un îlot sanitaire a été délimité autour de l'abbaye aux Hommes et de l'hôpital psychiatrique du Bon-Sauveur pour accueillir la population caennaise et les nombreux blessés, et un second dans le quartier Sainte-Thérèse. Tout est réquisitionné,
C'est alors que naît chez les Caennais un formidable élan de solidarité pour venir en aide aux sinistrés. Les biscuitiers caennais, tout comme le minotier Lemanissier, participent à cet effort de solidarité. Victime des bombardements du 8 juin 1944, l'usine Jeannette a cessé toute activité. 25 % des bâtiments de l'usine sont sinistrés : toitures abîmées et matériel détérioré. Pire encore, les Allemands pillent l'intérieur, le stock de marchandises disparaît, ce qui ajoute à la désolation du lieu. Ces dégâts n'empêchent pas Lucien Jeannette de se porter volontaire auprès de la Défense Passive pour venir en aide aux malheureuses victimes. La camionnette de l'entreprise Jeannette est utilisée pour le poste sanitaire n°3 dirigé par madame Chapel, et établi dans les caves de l'immeuble en construction à l'angle de l'avenue Charlotte Corday et de la rue de Formigny dans le quartier Sainte-Thérèse de Caen, presque en face de l'usine actuelle (rue de la Marne). Il s'agit d'une équipe composée de trois médecins, d'une vingtaine de brancardiers et de neuf infirmières à qui l'on a confié la mission de soigner les Caennais de la rive droite, victimes des bombardements. Parmi les brancardiers volontaires, se trouve Lucien Jeannette, qui, dès la première heure, s'est porté volontaire pour, écrira-t-il plus tard, de façon bien modeste, «servir aux transports les plus divers ». Tâche ingrate que de se faufiler sous les bombes, parmi les décombres encore fumantes, pour dégager les blessés et les cadavres ! Les brancardiers reçoivent la mission de transporter les nombreux cadavres chez les Petites Sœurs des Pauvres. Quant aux blessés graves, ils sont acheminés tant bien que mal vers l'unique passerelle de la rue de l'Arquette qui enjambe l'Orne à l'entrée du Grand Cours. Le pont Alexandre III a été mis hors service par les premiers bombardements. De là, une ambulance les attend pour les convoyer vers le Bon-Sauveur, transformé en poste chirurgical. Après la destruction de la passerelle le 6 juillet, les blessés sont convoyés sur Giel, dans l'Orne, via Saint-Sylvain. » (…)
« À Ifs, le 6 juin 1944 n'apporte pas la libération immédiate que beaucoup espérait : les combats pour la libération de la commune durent plusieurs semaines. Enfin, le 20 juillet 1944, Ifs est libérée conjointement par les Canadiens du Winnipeg et du Scottish Régiment (Ifs plaine), le Black-Watch canadien (Ifs-bourg) et la 11e DB anglaise (Ifs-Bras). Cette libération intervient deux jours après celle de la ville de Caen, Libres, mais à quel prix ? Dix Ifois sont morts sous les bombes ou par fait de Résistance et quarante-trois familles se retrouvent sans logement. La commune doit aussi assurer le logement des habitants dont les maisons ont été détruites. Les cultures sont dévastées et les bâtiments publics sont sinistrés. Tout est à refaire : les chemins, l'alimentation en eau potable, l'électricité. Il faut aussi organiser l'hébergement et la subsistance de milliers de Caennais réfugiés au hameau de Bras et procéder, dès 1947, au « désobuage » en nettoyant la commune des vestiges des terribles combats qui se sont menés sur son territoire. C'est alors que Lucien Jeannette va donner toute la mesure de son dévouement en prenant, en tant qu'élu municipal, la responsabilité de la Commission de la Reconstruction. Il y apporte le même désintéressement que lorsqu'il était brancardier au poste sanitaire n° 3 de Sainte-Thérèse. Il y a fort à faire, car il s'agit de reloger les familles sinistrées et de reconstruire le clocher de l'église, la mairie, l'école et le presbytère, À la hâte, il fait réquisitionner les quelques logements vides puis fait venir des baraquements provisoires. On rencontre souvent la petite silhouette de Lucien Jeannette à Caen, lors des conférences organisées à la Préfecture avec les architectes, à propos des constructions provisoires en bois, fabriquées en Allemagne et dont le prix est deux fois moins élevé que les constructions en dur de même importance, « offrant, écrit-il au maire, toute garantie de durée et n'ayant rien de commun avec les constructions provisoires en bois que nous connaissons ». Ces baraquements provisoires installés dès 1947, ont permis aux habitants de la commune d'avoir un toit, en attendant la reconstruction de leur logement. Grâce au dévouement sans relâche de Lucien Jeannette, adjoint au maire, la commune d'Ifs renaît de ses cendres. Son activité en faveur de ses concitoyens, son rôle dans la Défense Passive sont appréciés et reconnus. Aux élections municipales de mai 1945, Lucien Jeannette est le mieux réélu obtenant dès le premier tour, 232 voix, devançant de 13 voix, le maire, Paul Rosette. [Paul Rosette est le propriétaire d'une ferme de 65 hectares, la plus importante de la commune d'Ifs qui compte en 1944, 28 exploitations agricole pour un population de 805 habitants.] »
Extraits de « La Biscuiterie Jeannette depuis 1850 » par Annie Fettu, Editions OREP 2010, pages 36-37-40.
Pour plus d'informations sur ce blog sur la Biscuiterie Jeannette :
http://il-etait-ifois.eklablog.com/disgest-ifs-a2396647
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On peut aussi pour « l’ambiance » durant l’Occupation et la Libération de ce secteur aller consulter un document publié par la commune voisine de Cormelles-le-Royal :
http://cormellesleroyal.free.fr/images/CORMELLES%20DANS%20LA%20TOURMENTE2.pdf
Tags : jeannette, commune, ifs, lucien, caennais
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